Les “convenience stores” (konbini)

Un rythme de vie différent

Il est quelquefois difficile pour un japonais de s’habituer au rythme d’un pays étranger, par il n’y a pas de magasin ouvert 24h/24.

Quand j’ai quitté Tokyo pour Paris, j’ai du m’habituer à ce nouveau rythme. Par exemple, je dois faire attention à préparer une liste de courses à faire pour ne rien oublier. En effet, les magasins ferment tôt et ne sont pas ouvert le dimanche ou/et le lundi. Si je n’ai rien préparé, le repas risque d’être irrémédiablement frugal !

Au contraire des occidentaux, nous n’avons pas l’habitude d’acheter les choses en grandes quantités (pack). Je pense que cela doit venir de l’alimentation traditionnelle japonaise, de préférence toujours fraîche.

Avec les changements de façon de vivre de notre époque moderne, nous demandons toujours plus de confort. Nous passons de moins en moins de temps à cuisiner, ce qui n’est pas en soit appréciable, mais c’est ainsi que des nouveaux types de commerces ont émergé. L’un d’entre eux est le restaurant familial. Ils visent une large clientèle avec des repas pour tous les goûts et tous les ages : menus occidentaux, chinois et japonais bien sur, tout ceci à des tarifs très raisonnables. La qualité, supérieure à des plats préparés, n’est pas oubliée avec une attention particulière sur l’aspect nutritif : le menu doit afficher la teneur en calories de chaque plat.

Une autre différence est la variété des restaurants, plus élevées au Japon : en effet, chaque restaurant japonais est spécialisé dans des plats traditionnels, plus des restaurants italien, français, coréen, chinois, etc.

C’est là surtout que les « convenience stores » (magasins de commodité) jouent un rôle important pour les japonais affairés. Quand nous n’avons même pas le temps d’aller au restaurant, nous faisons un saut par ce type de magasin pour acheter non seulement de la nourriture, mais aussi de nombreux objets ou services.

Vous pouvez :

.poster un colis .investir votre argent
.envoyer une lettre, acheter des timbres .commander et acheter des objets populaires, CD, DVD, jeux vidéo, etc.
.photocopier .faire ses achats à partir du web
.faire développer des photos .louer des chambres d’hôtel, acheter des séjour dans le pays ou à l’étranger, des places d’évènements sportifs, de théâtre, de transport ou de vol
.faxer .acheter des places de cinéma, de parc d’attraction ou autres évènements
. retirer de l’argent .acheter des places pour des concerts, des évènements sportifs ou des pièces de théâtre
. retirer de l’argent d’un distributeur .acheter un billet pour le muse GHIBLI
.déposer de l’argent .souscrire à des assurances pour voyager, pour la voiture ou à diverses mutuelles
.acheter des cartes de téléphones nationales ou internationales pré-payées . jouer au loto sportif (foot)
. payer à crédit . s’inscrire à des cours par correspondance et payer les frais d’inscription à l’université
. commander un gâteau d’anniversaire, un repas de fête, etc . s’inscrire et payer pour divers examens de passage de certification ou licence
. gagner des réductions dans les magasins de location Tsutaya (CD,VDEO) : Certains magasins livrent n’importe quels objets commandés, comme les ingrédients d’un dîner.

: Ils font réchauffer votre nourriture au comptoir avec un micro-onde

. s’inscrire dans une école de conduite automobile :Vous pouvez utiliser leurs toilettes

:Vous faire vos courses sur Internet

. faire imprimer ses photos numériques : certains font pressing

: certains ont un service médical pour faire un petit bilan de santé

Bien sûr, vous pourrez quand même acheter presque tout : alimentation, boissons, magazines, papeterie, cosmétiques et autres objets du quotidien.

. .
Ce ne sont pas de simples plats préparés, car les ingrédients sont sélectionnés et pensés pour la nutrition
.. . . . . . . . .
. . . . .

Ainsi, j’ai été surprise à mon arrivée de voir les magasins fermer tôt ainsi que le dimanche et le lundi. J’avais l’habitude à Tokyo d’avoir près de chez moi un « convenience store » ouvert en permanence. Et je n’avais pas besoin de me rendre successivement dans une épicerie, puis dans un bureau de poste, une banque, etc.

Une autre différence est le nombre de nouveautés distribuées au supermarché. Au Japon, de nouveaux produits sortent chaque mois. Par exemple, quand j’étais à Tokyo, j’avais l’habitude de manger régulièrement des menus Bento (repas complet à emporter) : chaque jour, je pouvais essayer un déjeuner différent. Il y a plusieurs grandes chaînes de convenience store et la concurrence est rude pour attirer un maximum de consommateurs. Pour cela, l’innovation permanente est un facteur clé.

Cela reste vrai aussi pour d’autres choses comme les boissons, les snacks, les desserts…
Ici en France, les produits alimentaires sont certes d’excellente qualité, mais concernant les choses pratiques à emporter, le choix est souvent limité à quelques types ou marques de sandwiches et de boissons, toujours à peu près identiques. Cela peut devenir lassant rapidement…

Si ce concept de confort urbain, exprimé par les convenience store, est donc bien pratique et plaisant, il y a en revanche des conséquences négatives à considérer. Elles ont été relevées dans l’éditorial d’un journal que j’ai trouvé, le Kobe Shinbun.

Un marché en plein essor

La nuit, les rues sont éclairées ici et là par les enseignes. Comme un papillon est attiré par la lumière, je suis magnétisé par l’entrée du magasin. Magazines, plats préparés, snacks, cosmétiques… même le personnel contribue à me fournir le plus grand confort. Bien des gens reconnaissent qu’un convenience store est comme un oasis sur le chemin du retour au foyer.

Vingt-sept ans ont déjà passé depuis que ce type de magasin, représentatif des longues heures passées au travail, a débarqué au Japon. Maintenant plus de 40 000 d’entre eux sont dénombrés au travers de notre petite île. Le nombre de ces magasins est 100 fois supérieur à celui des grands magasins et dépasse de 24 fois celui des supermarchés. Le leader du secteur, Seven-Eleven, avec son chiffre d’affaire de plus de 3 milliards de yen pour ce mois de février, surpasse celui du plus grand supermarché, Daiei. Seven-Eleven se trouve ainsi propulsé parmi le top des distributeurs, toutes catégories confondues.

Le convenience store n’est plus dorénavant considéré comme un endroit “pour les jeunes” ou “pour les urgences”. C’est devenu un lieu fréquenté par tout le monde, sans distinction sur l’âge ou le sexe. Les services proposés sont sans cesse plus nombreux et de meilleure qualité. Même dans la préfecture de Hyogo (ndtr : où le journal Kobe Shinbun est basé), à peu près 1700 de ces magasins se livrent une forte concurrence.

Un rôle social

Presque tous les convenience stores sont des franchises de grandes chaînes. Au début, ce système était sévèrement critiqué, de crainte que l’uniformité qui en découle en terme d’apparence et de produits de vente ne détruise les spécificités locales. Certains considéraient même qu’il était honteux pour les mères au foyer de se rendre dans de tels magasins. Cependant, un groupe de consommateurs et des chercheurs ont commencé à changer cette tendance, en amenant la réflexion suivante : si ces chaînes se généralisent partout, leur rôle peut être socialement intéressant dans une société vieillissante, en maintenant le service pour les personnes âgées.

Effectivement, notre point de vue sur les convience stores a radicalement changé au cours de la dernière décennie. Ce n’est plus un endroit où nous payons les produit à un prix élevé parce que les autres magasins sont fermés, mais un endroit où nous nous arrêtons fréquemment pour tuer le temps même si nous n’avons rien à y acheter de particulier.

Pourtant, il y a peu de place à l’intérieur de ces magasins : comment donc pouvons-nous avoir cette approche ? Pourquoi sommes-nous attirés par leurs éclairages à la tombée de la nuit ?

Comme principales raisons, on citera les services et stratégies marketing poussées de ces magasins : système de livraison, service de prévisions météo, innovation incessante avec des produits nouveaux.

Ou encore : ambiance familiale, locaux à taille humaine, sans parler de l’apport de services administratifs que la commune ne peut parfois apporter.

Les convenience stores sont ainsi un véritable reflet de la société japonaise.

Cependant, malgré sa croissance rapide et constante, cette industrie a atteint son apogée et commence quelque part à arriver à saturation. Dans les grandes villes, il s’agit même d’une lutte pour survivre, les grands distributeurs d’alimentation ayant amorcé une contre-offensive en baissant les prix. Conséquence : plus d’un millier de ces magasins, seulement parmi les six plus grandes chaînes, ont fermé l’an dernier.

Au contraire de ceux qui fréquentent les grandes surfaces de distribution, les consommateurs ne sont pas particulièrement fidèles à une marque spécifique de convenience store. De plus, le proche voisinage de ces magasins se plaint souvent du bruit et des détritus générés.

Cependant, du fait de leur implication dans les services sociaux, il n’est dans certains cas pas souhaitable de voir un magasin fermer parce qu’il n’est plus rentable.

Par exemple, un convenience store près d’un centre de réhabilitation public à Kobe reçoit beaucoup de personnes en difficultés. Les employés à mi-temps ont un savoir de base sur la manière d’accueillir et de traiter ce type de personnes. Le magasin emploie aussi des stagiaires de ce centre de réhabilitation et propose une caisse spéciale de dons.

A la hauteur des attentes ?

On attend beaucoup des convenience stores quant à leur rôle social. En développant de nouveaux projets en fonction des spécificités locales, il serait possible d’instaurer un nouveau type d’infrastructure, supportant par exemple du bénévolat ou autres activités locales. Les magasins offriraient des produits et des services pour les personnes âgées ou diffuseraient les informations communales. Beaucoup d’opportunités pourraient se créer ainsi, en s’appuyant sur les convience store.

L’idée suivante est même évoquée : en cas de déficit, on pourrait envisager un apport de fonds publics dans les magasins pour combler leur déficit et de maintenir l’accès aux services de zones reculées.

L’association de consommateurs de Kobe effectue des recherches depuis trois ans sur les conveniences stores comme sur les assurances pour les soins de santé des personnes âgées.
Les jeunes les considérant comme sûrs et confortables, les membres de l’association espèrent que ces magasins seront un des accès principaux aux soins de santé à l’avenir.

Au printemps dernier (2005), une équipe de chercheurs s’est établie au laboratoire des sciences humaines de Hyogo et étudie la possibilité de créer un service semi-public établissant des liens avec les établissements privés locaux. On en attend quelques idées ingénieuses, mais l’essentiel sera bien d’adopter cette attitude positive avec la société et d’agir comme une ressource à part entière de celle-ci, en sortant quelque peu des seules considérations commerciales…

Les plus grandes chaînes de supérettes au Japon :

Seven-Eleven Japan

Family Mart

Circle K Sunkus

Source : Le Kobe Shinbun, 05/06/2005