Koizumi : une page se tourne

Une page s’est tournée avec le départ du pouvoir de Junichiro Koizumi, le premier ministre du Japon. Il laisse un bilan positif, avec l’arrêt de la déflation, le taux de chômage le plus bas depuis 7 ans (4,1%) et une phase de croissance la plus longue depuis 1945. Il aura connu une assez grande popularité, surnommé amicalement henjin (type bizarre) pour ses exentricités : ballade en trotinette futuriste, tango avec Richard Gere, mime d’Elvis Presley, etc. Il n’aura pas non plus hésiter à figurer sur une publicité TV internationale faisant la promotion des investissements au Japon. Cependant, certains lui reprochent d’avoir créer des inégalités dans la société japonaise, jusque là très égalitariste. Les japonais considèrent de plus en plus qu’il y a des gagnants et des perdants dans leur société.

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M. Koizumi aura été un premier ministre atypique

Shinzo Abe, son bras droit également très populaire, va lui succéder. A 52 ans, il est le plus jeune premier ministre de l’après-guerre. Conservateur, il devrait d’une certaine manière s’inscrire dans la continuité de Koizumi, mais peut-être avec plus de poigne sur des dossiers comme celui des agressions de la Corée du Nord. Il compte renforcer la force militaire défensive du Japon, en réformant si nécessaire la constitution issue de la seconde guerre mondiale. Celle-ci impose un certain nombre de restrictions sur l’armée japonaise, la limitant en fait à une force de défense. Il veut clairement réaffirmer le Japon en tant que puissance régionale et arbitre face à la montée de la Chine et la concurrence de la Corée du Sud.

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Shinzo Abe

La réaction des médias français a été plutôt critique, de manière discrète certes, mais réellement critique. M. Abe ayant eu son grand-père arrêté par les américains comme criminel de guerre et jamais jugé, un parallèle a été fait avec cette période sombre de l’histoire. Je ne suis pas sûr que ce parallèle était inévitable, d’autant que le Japon a fait montre depuis longtemps qu’il avait changé et était maintenant un des pays les plus pacifistes du monde, souvent premier contributeur à de nombreuses aides humanitaires.
Je ne crois pas qu’on puisse faire un procès d’intention à M. Abe d’être un homme de guerre – et encore moins que ce soit la volonté des japonais. Pourquoi ne pas faire à nouveau confiance aux japonais de la même façon que nous le faisons maintenant avec les allemands ?

Mon impression personnelle est que ce ne serait pas une mauvaise chose que le Japon ait les moyens de disposer d’une certaine force de dissuasion. Face à des menaces réelles et à un environement régional plutôt instable, il est plutôt dangereux que le Japon soit si dépendant des Etats-Unis pour sa défense.